Critique de Film | 2001: A Space Odyssey (Stanley Kubrick – 1968) Critique d’un cinéphile amateur déçu

Ceux-ci furent si spectaculaires et réalistes qu'on a encore aujourd'hui de la difficulté à concevoir que le film ait pu être conçu et tourné avant que l’homme ne mette le pied sur la lune! Par contre, d'’autres éléments m’apparaissent toujours quelconques, pour ne pas dire carrément faibles. Je me lance!

Je divise le film en 4 parties :

1) le drame évolutionnaire épique

2) le documentaire spatial prophétique

3) le thriller machiavélien et manichéiste
    (duel homme vs machine)

4) le bad trip originel psychédélique

Trame sonore : 10 / 10 (la musique évidemment, mais aussi le silence quand on s’attend à une explosion ou un sursaut bien sonore. Par exemple, la séquence à l’extérieur du vaisseau lorsqu’on n’entend que le bruit strident et la respiration pendant 10 minutes! Les parties 1 et 3 sont carrément sublimes tandis que la partie 4 est puissamment rendue. 2001 n’a rien à envier aux trames sonores contemporaines, même les meilleures… sans oublier qu’il est parvenu à accoler l’étiquette de « musique spatiale » à un chef d’œuvre de la musique classique, ce qui est quand même tout un tour de force!).
Photo : Wikipedia

Effets spéciaux : 9 / 10 par rapport à aujourd’hui (c’est tout de même incroyable!); 11/10 pour l’époque (le réalisme et l’éloquence des mouvements et du non-verbal des « chimpanzés » dans la partie 1 est prodigieux; le soin rigoureux et maladif accordé au réalisme et à l’authenticité est stupéfiant dans l’espace et sur le vaisseau; la construction « réelle » de la grande roue reproduisant artificiellement la gravité est ahurissante; la représentation futuriste, tout spécialement les vaisseaux, est superbement réaliste et impressionnante, clairement le précurseur de Star Wars. A++ sur toute la ligne; un changement de paradigme certain).


Mise en scène et rythme : 8,5 / 10 (Vrai que le rythme est fascinant pour faire écho à l’infini de l’univers et de l’espace-temps, mais certains scènes étaient tout de même un peu longues. Avec le recul, il s’agit clairement d’un film de 75 minutes qu’on a doublé en durée afin de reproduire ce sentiment de solitude et d’immensément grand. Ingénieux, mais pas nécessairement agréable sur toute la ligne. Génial cependant pour les parties 1 et 3)

Thématique : 8 / 10 (la thématique de l’exploration spatiale n’était pas originale en soi à l’époque surtout que la course à la conquête de l’espace a été lancée à peu près au même moment. C’est vraiment le traitement du sujet qui fait la force du film, tout spécialement le réalisme des parties 2 et 3 qui tranche de manière drastique et irréversible avec le traitement très série B des films de science fiction qui l’ont précédé.)
Photo : Warner Bros

Intrigue : 7 / 10 (il y a en fait 2 intrigues bien distinctes dans ce film si on simplifie le tout : le duel homme/machine de la partie 3 – un précurseur des Terminator et Matrix de ce monde – et l’intrigue du monolithe, de la vie extra-terrestre et du sens de l’univers/évolution. Si la première fut traitée avec brio pour l’époque, il faut avouer qu’elle paraît très simpliste et télégraphiée avec les standards d’aujourd’hui, tout spécialement étant donné l’acharnement à clamer que la série HAL est infaillible, donnant clairement le ton à la suite des choses. Concernant la seconde intrigue, je ne partage absolument pas l’enthousiasme de plusieurs cinéphiles : la fin du film m’apparait bâclée et ne répond aucunement aux questions que tous se posent tout au long du film. Je ne parle même pas d’expliquer ou non le fonctionnement du monolithe ou la présence de la vie extra-terrestre/divine; je parle simplement de l’absence totale de logique et de réponses convenables dans la 4e partie, notamment pourquoi le survivant – à l’intérieur du vaisseau à la fin de la partie 3 – se retrouve soudainement dans le pod? Comment est-il entré en contact avec le monolithe pour « accélérer » son évolution (imagé par le vieillissement)? Est-il sur Jupiter ou non? Il manque carrément 30 minutes d’explication pour faire le pont entre la partie 3 et la partie 4. En fait, il manque une partie au complet.

D’ailleurs, sur tout le matériel d’analyse et d’entrevue disponible à postériori, tous s’entendent pour dire que Kubrick aurait eu besoin d’une année et de 25% plus de budget, mais que la réalité l’a rattrapé et qu’il a dû fournir une version inachevée de son odyssée de l’espace. Ensuite, la question que tous se posent mais dont l’absence de réponse est moins problématique : que signifie le bébé en boule : la réincarnation, l’évolution accélérée après avoir été en contact avec le monolithe, la vie éternelle de l’âme, etc. Si l’absence de réponse à la dernière question revêt un caractère mystique et intéressant, l’absence totale de lien entre la partie 3 et la partie 4 est déstabilisante et décevante!)



Photo : CollativeLearning.com

Traitement : 7 / 10 (plusieurs critiques ont détruit le film Contact car celui-ci minimisait le caractère universel de la mission, les Japonais et les Russes étant alors relégués comme partenaires de 2e ordre alors que les États-Unis tout puissant étaient les grands artisans du programme. On peut/doit formuler la même critique à l’endroit de 2001 : le film avec ses Pan-Am, Howard Johnson et drapeaux américains omniprésents est très américano-centrique et si on critique les œuvres similaires contemporaines sur cet aspect, on se doit de faire de même avec les chefs-d’œuvre passés. Par contre, le film n’est pas tombé dans le piège de l’explication mystique simpliste ni dans un traitement trop judéo-chrétien de l’évolution notamment dans la partie 4; c’est évidemment très positif avec le recul et rend plus intemporel l’œuvre finale).

Conclusion objective : malgré les moments forts du film et le traitement irréprochable aux niveaux sonore et effets-spéciaux, je ne vois tout simplement pas comment on peut octroyer une note supérieure à 8,5 sur 10 – dans le meilleur des cas 9 sur 10 – à 2001 et ce même en considérant l’apport immense à l’Histoire du cinéma. La fin est bâclée et peu importe son caractère évasif – ce qui n’est ni positif ni négatif, mais simplement un choix du cinéaste qui confère avec le recul un aspect intemporel et mythique au film – le pont entre la partie 3 et la partie 4 est extrêmement faible pour ne pas dire inexistant. Uniquement pour cet aspect, on se doit de retrancher au moins un point et ce même si on considère tout le reste parfait (ce qui n’est pas mon cas!).

Conclusion subjective : non seulement la fin est bâclée, mais en plus elle est très typique de l’époque expérimentale/psychédélique propre aux Baby boomers les plus bohèmes/rebelles. D’ailleurs, très peu parmi ceux qui disent avoir été influencés par ce film (et non Kubrick en général) ont moins de 50 ans. Les projections en salle ont d’ailleurs passé à un doigt d’être arrêtées prématurément par manque d’intérêt; n’eut été d’un « fétichisme » naissant à l’égard de cette œuvre de la part d’une poignée de jeunes artistes et/ou adeptes du LSD, le film n’aurait jamais connu une si grande vénération! Personnellement, je préfère l’époque Roger Waters à celle de Syd Barrett lorsque j’écoute du Pink Floyd; j’imagine que cela se traduit dans mon appréciation du cinéma!

De plus, je reviens sur l’aspect très générationnel de ce succès : comme l’ont mentionné les personnes interviewées sur de nombreux suppléments/entrevues, les générations X et Y ont une fixation sur l’immensément-petit alors que la génération Baby Boomer semblait avoir une fixation sur l’immensément-grand. D’ailleurs, la question de la recherche spatiale n’est-elle pas quasiment absente de l’actualité depuis 20-25 ans? Si j’avais vu ce film il y a 40 ans, sûrement que mon appréciation eut été différente, mais l’intrigue somme toute assez simple [selon les standards de 2012] de la partie 3 et le traitement très psychédélique et approximatif des parties 4a [totalement absente] et 4b [décevante] me laissent tout simplement sur ma faim – pour ne pas dire enragé de ce coït cérébral et visuel inachevée – chaque fois que je regarde 2001!

6,5 / 10 est ma note personnelle finale en tenant compte que j’ai vu ce film pour la première fois en 1996 (alors âgé de 19 ans).

2001: A Space Odyssey doit faire partie du Top 10 de tous les temps concernant les films les plus influents – peut-être même du Top 3 – mais il est clairement exclu de mon Top 100 de mes films préférés : Trop contemplatif, trop évasif, mais surtout bâclé à partir du 2/3.

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10 août 2012

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